Mémoire faisant suite à la consultation du ministère du Solliciteur général au sujet des modificatio

Mémoire faisant suite à la consultation du ministère du Solliciteur général au sujet des modifications proposées au Règlement 778

mai 14, 2021

14 mai 2021

Je tiens à vous remercier pour cette occasion de présenter des observations sur le projet du ministère du Solliciteur général de modifier le Règlement 778 concernant l’isolement, la discipline et la mauvaise conduite des détenu(e)s ainsi que la formation obligatoire des agent(e)s correctionnel(le)s.

Mémoire faisant suite à la consultation du ministère du Solliciteur général au sujet des modifications proposées au Règlement 778

Paul Dubé
Ombudsman de l’Ontario

Mai 2021

 

Introduction

1    Je tiens à vous remercier pour cette occasion de présenter des observations sur le projet du ministère du Solliciteur général de modifier le Règlement 778 concernant l’isolement, la discipline et la mauvaise conduite des détenu(e)s ainsi que la formation obligatoire des agent(e)s correctionnel(le)s.

 

L’Ombudsman et son rôle d’amélioration de la surveillance des services correctionnels

2    Le Bureau de l’Ombudsman de l’Ontario a une expertise et des connaissances uniques sur cette question du fait de ses fonctions de surveillance d’un bon millier d’entités publiques, dont les établissements correctionnels relevant du ministère du Solliciteur général. Durant l’exercice 2019-2020, mon Bureau a reçu 6 000 plaintes au sujet d’établissements correctionnels pour adultes, notamment 162 concernant l’isolement et 120 touchant la discipline et la mauvaise conduite.

3    Outre la résolution des plaintes individuelles, mon Bureau recommande depuis longtemps des améliorations du système correctionnel de la province. En 2013, il a enquêté sur la réaction du ministère de la Sécurité communautaire et des Services correctionnels à des allégations d’usage excessif de la force contre des détenu(e)s et formulé 45 recommandations pour améliorer les choses[1]. En 2016, il a fait 28 recommandations à la suite de la consultation du Ministère sur ses politiques d’isolement[2]. En 2017, il a mené une enquête systémique sur les pratiques du Ministère pour faire le suivi des admissions et du placement des détenu(e)s en isolement, et sur l’adéquation et l’efficacité de son processus d’examen de ces placements. Le rapport qui en a résulté – Les oubliés de la surveillance – renferme 32 recommandations d’amélioration, lesquelles ont toutes été acceptées[3]. Plus récemment, mon Bureau s’est penché sur la consultation menée en 2019 par le Ministère au sujet des modifications proposées aux dispositions sur l’examen des pratiques d’isolement du Règlement 778.

4    Dans tous ces rapports et mémoires, mon Bureau a toujours insisté sur l’importance de doter les établissements correctionnels ontariens de politiques claires, d’un processus de surveillance rigoureux et d’une formation complète du personnel. Ces facteurs profitent au personnel et aux détenu(e)s.

5    J’applaudis bon nombre des modifications que le Ministère propose d’apporter au Règlement 778, surtout celles concernant l’isolement, et je constate qu’elles font généralement écho aux recommandations que mon Bureau formule depuis des années. J’applaudis aussi les modifications visant à obliger le personnel correctionnel à suivre une formation sur les droits de la personne et le racisme systémique, de même que sur la désescalade et l’usage de la force. Dans son enquête de 2013 sur la réaction du Ministère aux allégations d’usage excessif de la force contre des détenu(e)s, mon Bureau avait souligné l’importance de bien former le personnel et formulé 12 recommandations d’amélioration[4]. Je me réjouis de voir que le Ministère a proposé de renforcer les exigences légales en matière de formation.

6    Cependant, je souhaite signaler les points suivants, pour lesquels les modifications réglementaires proposées ne suivent pas tout à fait les recommandations déjà formulées par mon Bureau, ou ne règlent pas vraiment les problèmes signalés dans son examen des plaintes.

 

Examens indépendants et importants de l’isolement

7    Les modifications proposées étendraient le processus actuel d’examen de l’isolement aux placements en isolement disciplinaire, en mettant l’accent sur la diminution des préjudices et la surveillance axée sur le signalement des cas de détérioration. Mon Bureau a déjà réclamé des examens indépendants d’envergure pour l’ensemble des placements en isolement, et je suis d’accord.

8    Toutefois, je reste profondément inquiet de l’indépendance de l’actuel processus d’examen consistant, selon ce qu’on nous a rapporté, en un « examen » par le bureau régional, ou le bureau du(de la) sous-ministre adjoint(e), des formulaires remplis par le personnel des établissements. Ce processus est de beaucoup inférieur aux comités d’examen indépendants que mon Bureau a recommandé d’établir en 2016, 2017 et 2019. Il est incontestable que l’isolement cause un préjudice grave aux détenu(e)s. La Cour supérieure de justice est arrivée à la conclusion factuelle que [traduction] « le placement en isolement préventif peut causer et cause un préjudice physique et mental, surtout aux détenu(e)s déjà atteint(e)s d’un trouble psychiatrique[5] ».

9    Au vu de ces conséquences graves, il est impératif que tous les placements en isolement fassent l’objet d’un examen externe indépendant. Dans son enquête de 2017 sur les pratiques d’isolement en Ontario, mon Bureau a constaté que le Ministère avait souvent omis de surveiller adéquatement les détenu(e)s en isolement, et que dans certains cas, les examens du personnel ministériel se résumaient à un estampillage de rapports insuffisants produits par les établissements. Les modifications proposées n’amélioreraient en rien cette situation. Je presse donc une fois de plus le Ministère d’établir un processus d’examen indépendant des placements en isolement.

 
Recommandation 1

Le Ministère devrait créer, pour l’examen des placements en isolement, un comité véritablement indépendant composé de membres nommés par le(la) ministre.

 

10    Dans mes observations et mon rapport précédents, je présentais en détail ma vision du fonctionnement d’un processus d’examen indépendant. Je me permets ici de réitérer ces recommandations.

11    Le comité indépendant nommé par le(la) ministre devrait tenir des audiences administratives dans les cinq jours qui suivent chaque placement en isolement. Le(la) détenu(e) devrait pouvoir y assister en personne ou par vidéoconférence, en compagnie d’un(e) représentant(e) de son choix. Il(elle) devrait avoir assez de temps pour s’y préparer et prendre connaissance du dossier. Le Ministère devrait lui donner accès à un(e) avocat(e) de service. L’audience se tiendra dans un endroit neutre si possible, jamais dans la cellule de la personne détenue ni dans une unité résidentielle.

12    Avant l’audience, le(la) détenu(e) en isolement devrait être tenu(e) de rencontrer un(e) conseiller(ère) qui l’informera de ses droits, notamment du droit à la représentation par avocat(e).

13    À l’audience d’examen, le fardeau de la preuve devrait reposer sur l’établissement, et le Ministère devrait être tenu de démontrer que l’isolement temporaire du(de la) détenu(e) était justifié.

14    À l’audience, le comité indépendant devrait évaluer le bien-être mental et physique de chaque détenu(e), et en tenir compte dans sa décision.

15    Le comité indépendant devrait faire connaître sa décision dans les 24 heures. Si l’une des parties le demande, il devrait être tenu de communiquer ses motifs écrits dans les 30 jours de l’audience.

16    Le comité indépendant devrait être investi du pouvoir de retirer un(e) détenu(e) de l’isolement immédiatement et d’accorder un vaste éventail d’autres mesures.

17    Le comité indépendant devrait être habilité à recommander que le(la) chef d’établissement amorce une enquête ou une procédure disciplinaire, selon le cas, pour les manquements aux règlements et politiques concernant l’isolement par un(e) membre du personnel correctionnel.

18    Le comité indépendant nommé par le ministre devrait relever de l’Ombudsman.

19    Je presse de nouveau le Ministère d’intégrer ces recommandations au Règlement, de façon à garantir un processus d’audience utile, indépendant et administrativement équitable.

 
Recommandation 2

Le Ministère devrait intégrer les recommandations de mon Bureau concernant la structure et le processus d’audience indépendant des placements en isolement. Le processus d’audience devrait être détaillé exhaustivement dans la version modifiée du Règlement.



 

Limitation des placements en isolement et nouveaux types de placements

20    J’estime louables les nouvelles limites que le Ministère propose pour la durée des placements en isolement, notamment le maximum de 15 jours consécutifs pour l’isolement préventif. Légaliser cette limite souligne son importance et l’engagement du Ministère à la faire respecter pour les détenu(e)s.

21    J’applaudis aussi l’intention du Ministère d’imposer l’obligation réglementaire de ne recourir à l’isolement qu’en dernier recours et l’interdiction spécifique de l’employer pour les personnes détenues atteintes d’une maladie mentale grave.

22    Toutefois, je crains que la définition proposée de « maladie mentale grave » exige que le(la) détenu(e) présente des symptômes et ait reçu un diagnostic d’un(e) professionnel(le) de la santé autorisé(e) pour que l’interdiction soit applicable. D’après l’expérience de mon Bureau, il peut être difficile pour un(e) détenu(e), même gravement atteint(e), de recevoir un diagnostic de maladie mentale en raison du type et de la durée de l’observation clinique habituellement nécessaire. Les politiques actuelles du Ministère parlent d’un(e) détenu(e) « présumé[e] atteint[e] d’une maladie mentale ou connu[e] pour en souffrir », ce qui donne au personnel une flexibilité accrue pour le travail auprès de patient(e)s qui n’ont pas toujours reçu de diagnostic formel. De plus, on se demande pourquoi il faudrait exclure de la définition les détenu(e)s ne présentant pas de symptômes. En effet, la jurisprudence récente[6] ayant établi que le placement en isolement préventif de personnes détenues atteintes d’une maladie mentale grave constitue une atteinte à la Charte, le Ministère devrait peut-être revoir la définition proposée de façon à indiquer expressément que les cas de détenu(e) « présumé[e] atteint[e] d’une maladie mentale ou connu[e] pour en souffrir » entrent dans la définition de « maladie mentale grave » indépendamment de la présence de symptômes.

 
Recommandation 3

Le Ministère devrait revoir la définition proposée et préciser que les cas de détenu(e) « présumé[e] atteint[e] d’une maladie mentale ou connu[e] pour en souffrir » entrent dans la définition de « maladie mentale grave » même en l’absence de symptômes.

 

23    Je trouve également préoccupantes certaines autres exceptions que le Ministère propose concernant les mesures de protection applicables aux placements en isolement. S’il est vrai que le Règlement exigerait une pause de 5 jours quand la période d’isolement atteint la limite de 15 jours consécutifs, les modifications proposées autoriseraient le(la) chef d’établissement à garder le(la) détenu(e) en isolement « s’il n’y a pas d’autres options » et que le(la) chef d’établissement croit que c’est nécessaire « pour des questions de sécurité immédiates ». Une exception similaire est prévue quand le(la) détenu(e) a cumulé 60 jours en isolement dans l’année. Ces motifs doivent être consignés, mais il est difficile de savoir ce qui constitue une « question de sécurité immédiate ».

24    Le Ministère devrait envisager d’imposer des limites additionnelles à l’interprétation et à l’application de ces exceptions pour éviter leur banalisation. Par exemple, une définition de ce qui constitue une « question de sécurité immédiate » pourrait être ajoutée au Règlement, qui pourrait en outre préciser les options que le(la) chef d’établissement doit examiner avant de garder le(la) détenu(e) en isolement. De plus, le Règlement pourrait exiger que ces exceptions soient autorisées par le(la) ministre ou son(sa) représentant(e).

 
Recommandation 4

Le Ministère devrait envisager l’imposition de limites additionnelles aux cas d’exception admettant qu’un(e) détenu(e) soit gardé(e) en isolement plus de 15 jours consécutifs, ou plus de 60 jours au total dans une même période de 365 jours.

 

25    Les modifications proposées prévoient la création de « placements en unité de soins spécialisés » qui répondent aux besoins de la population carcérale de chaque établissement, et j’espère que cela sera source de solutions préférables à l’isolement préventif pour les détenu(e)s impossibles à placer dans des unités normales. Les modifications proposées exigeraient également des placements en isolement dans une unité médicale, ce qui serait une autre solution dans certains cas.

26    En créant ces unités spécialisées par règlement, le Ministère se doit d’être prudent et d’éviter d’instaurer des formes de placements assimilables à un isolement déguisé. La définition réglementaire proposée de l’isolement vise à régler ce problème et repose sur la prémisse suivante : disposer de ressources suffisantes pour le suivi du degré d’interactions sociales et de liberté d’aller et venir dont bénéficie la personne détenue quotidiennement.

27    Dans mon rapport de 2017, j’ai relevé des lacunes sérieuses dans le suivi des placements et mouvements des détenu(e)s, et recommandé que le Ministère envisage des solutions technologiques en vue d’automatiser ce processus pour réduire le risque d’erreur humaine. L’accent étant davantage mis sur les conditions de l’isolement et les solutions de placement autres que l’isolement, ce type de suivi est indispensable si nous voulons que l’ensemble des détenu(e)s placé(e)s dans des conditions apparentées à l’isolement profitent des protections procédurales auxquelles ils(elles) ont droit.

 
Recommandation 5

Le Ministère devrait veiller au suivi systématique et précis des mouvements et interactions sociales des détenu(e)s afin que l’ensemble des détenu(e)s placé(e)s dans des conditions apparentées à l’isolement bénéficient des protections procédurales intégrées au processus d’examen des pratiques d’isolement.



 

Garantir l’équité procédurale dans les décisions sur les cas de mauvaise conduite

28    Les modifications proposées par le Ministère nécessiteraient que divers changements soient apportés au processus de traitement des cas de mauvaise conduite par l’instauration d’un processus de règlement parallèle à l’actuel processus décisionnel.

 

Processus de règlement non traditionnel

29    Je salue le Ministère pour l’attention qu’il accorde aux nouvelles mesures disciplinaires et au processus décisionnel officiel, mais j’estime préoccupant le risque d’érosion des garanties procédurales actuelles. Mon Bureau reçoit souvent des plaintes de détenu(e)s jugeant qu’il y a eu manquement aux mesures de protection visant l’équité procédurale pour les cas de mauvaise conduite. Certain(e)s se plaignent de ne pas avoir été informé(e)s de la raison de leur mauvaise conduite, de ne pas avoir reçu la documentation requise (avis de mauvaise conduite ou décision) ou d’avoir été jugé(e)s pour inconduite par des membres du personnel eux-mêmes(elles-mêmes) impliqué(e)s dans l’incident. Un problème souvent signalé : la personne détenue n’a pas pu présenter d’arguments ni d’explications pour contester les allégations ni appeler de témoins.

30    Certaines modifications proposées s’attaquent à ces problèmes, notamment l’exigence de fournir au(à la) détenu(e) un document de décision dans le cas d’une décision par processus formel, et l’exigence que la décision soit prise par une personne qui n’est pas directement impliquée dans l’incident.

31    Ces protections procédurales semblent absentes du processus de règlement proposé, qui reposerait surtout sur l’accord donné par le(la) détenu(e) à la mesure disciplinaire sanctionnant sa mauvaise conduite. Je m’inquiète de l’asymétrie des pouvoirs entre la personne détenue et le personnel correctionnel, et je trouve douteux qu’il soit admis que le(la) détenu(e) donne son accord à la mesure disciplinaire et perde ainsi la protection procédurale inhérente au processus formel. Le Ministère devrait réfléchir aux moyens de garantir que la décision du(de la) détenu(e) de participer au processus de règlement non traditionnel soit une décision éclairée prise de plein gré.

 
Recommandation 6

Le Ministère devrait réfléchir aux moyens de garantir que la décision du(de la) détenu(e) de participer au processus de règlement non traditionnel soit une décision éclairée prise de plein gré.



 

Processus ministériel de révision

32    Les modifications proposées entraîneraient des changements au régime ministériel de révision prévu à l’article 33 lorsque la personne détenue allègue qu’il y a eu irrégularité procédurale ou que la mesure disciplinaire a pour effet d’annuler sa réduction de peine ou son admissibilité à une telle réduction. J’appuie cette exigence, mais les modifications proposées ne s’attaquent aucunement aux principaux problèmes signalés par mon Bureau dans l’actuel processus de révision, à savoir les retards et la faiblesse des motifs avancés.

33    Mon Bureau a reçu des plaintes de détenu(e)s au sujet de retards dans le processus de révision. En particulier, ces personnes craignent souvent qu’un incident de mauvaise conduite en instance de révision se répercute sur leur classification de sécurité au moment d’un transfert dans le réseau provincial ou vers un établissement fédéral, ce qui pourrait finir par les amener dans un établissement à sécurité plus élevée.

34    Dans un cas particulier, le détenu avait demandé une révision en octobre 2018 et n’avait toujours pas reçu de décision plus d’un an après, bien qu’il ait plusieurs fois communiqué avec le Ministère à ce sujet. Il s’inquiétait de savoir que l’incident en question restait inscrit à son dossier pendant ce temps, et a dit avoir été transféré souvent et que l’incident avait eu un effet sur sa classification. Mon Bureau a été informé que ces révisions étaient complexes et exigeaient la consultation de nombreux dossiers. Le détenu a reçu une décision en février 2020.

35    Dans l’examen des plaintes, nous avons constaté que des retards se produisent pour de nombreuses raisons, notamment l’omission par l’établissement de transmettre la demande de révision au Ministère ou de préparer à temps la trousse contenant l’information sur l’appel (souvent attribuable à l’insuffisance des ressources). Nous savons qu’il y a eu une récente augmentation des dossiers en attente en raison de la fermeture de bureaux et des difficultés de transmission des dossiers à distance pendant la pandémie.

36    Vu les conséquences graves d’une décision de mauvaise conduite, j’invite le Ministère à établir des échéanciers clairs par règlement pour les révisions du(de la) ministre et à veiller à l’affectation de ressources suffisantes pour faire respecter ces délais.

 
Recommandation 7

Le Ministère devrait établir des échéanciers clairs par règlement pour les révisions du(de la) ministre et affecter suffisamment de personnel pour assurer le respect des délais.

 

37    Dans l’examen des plaintes des détenu(e)s ayant demandé une révision ministérielle de leur dossier de mauvaise conduite, mon personnel a constaté que les lettres les avisant de la décision du(de la) ministre étaient brèves et n’expliquaient pas les motifs de la décision. Le Ministère nous a précisé que le détail des motifs n’est pas expliqué aux détenu(e)s. En fait, la lettre fait habituellement savoir qu’après examen du dossier, il a été décidé d’annuler ou de maintenir la mention de mauvaise conduite. Par exemple, un détenu a demandé une révision parce qu’on avait omis de l’informer de son inconduite dans le délai prévu et que la décision avait été prise par un(e) agent(e) impliqué(e) dans l’incident, donc le Ministère l’a informé que la mention de mauvaise conduite avait été annulée pour « erreurs techniques ».

38    Dans sa version actuelle, le Règlement exige que le(la) ministre ou son(sa) représentant(e) avise la personne détenue et le(la) chef de l’établissement de la décision révisionnelle et « des motifs de celle-ci ». Expliquer les motifs de décision est important parce que les détenu(e)s, mon Bureau et les établissements peuvent ainsi comprendre pourquoi la mention de mauvaise conduite a été annulée ou maintenue. Cela constitue un gage de transparence et aide à garantir que la décision est fondée sur les preuves disponibles et respecte le droit et les règles applicables. J’invite donc le Ministère à modifier le Règlement de manière à mieux préciser le type d’information que le(la) ministre doit indiquer dans ses motifs écrits. Par exemple, le Règlement pourrait préciser que les motifs du(de la) ministre doivent présenter la question à l’examen, les faits en cause, le droit ou les règles applicables, le détail de l’examen des éléments de preuve et la conclusion issue d’une application du droit et des règles aux faits examinés.

 
Recommandation 8

Le Ministère devrait préciser dans le Règlement le type d’information que le(la) ministre doit fournir dans ses motifs de décision d’annuler ou de maintenir la mention de mauvaise conduite faisant l’objet de la révision.



 

Sanctions concurrentes ou consécutives

39    Même si les modifications proposées changeraient les modalités d’imposition de mesures disciplinaires normales ou « sévères », elles ne disent pas grand-chose sur l’application de ces sanctions aux détenu(e)s qui reçoivent plusieurs mentions de mauvaise conduite.

40    Mon personnel a déjà porté à l’attention du Ministère un dossier dans lequel une personne détenue avait reçu deux mentions de mauvaise conduite en lien avec des incidents différents survenus en trois jours, chaque cas s’étant soldé par une suspension des privilèges de cantine pour 120 jours. L’établissement a décidé que les suspensions seraient consécutives (240 jours) plutôt que concurrentes. Après examen, mon Bureau a constaté l’absence de toute directive au sujet de mesures disciplinaires s’appliquant consécutivement en pareil cas. La version modifiée du Règlement prévoit des « facteurs clés » devant entrer en ligne de compte au moment d’imposer la sanction, mais les modifications ne s’attaquent pas directement à cette question. Vu les intérêts en jeu et les conséquences graves que peuvent avoir les mesures disciplinaires, j’invite le Ministère à préciser dans le Règlement les cas où les mesures disciplinaires d’incidents séparés seraient appliquées concurremment ou consécutivement.

 
Recommandation 9

Le Ministère devrait préciser dans le Règlement les cas où les mesures disciplinaires pour différents incidents s’appliquent concurremment ou consécutivement.



 

Conclusion

41    Je trouve encourageantes les améliorations supplémentaires que le Ministère apporte dans les modifications proposées, et je me réjouis de constater que certaines font directement suite à mes recommandations. Cependant, les principales recommandations de mon Bureau concernant l’isolement restent sans action, et j’invite de nouveau le Ministère à s’engager à améliorer ses pratiques.

42    Mon équipe sera heureuse de fournir davantage d’information et de répondre aux questions au sujet du présent mémoire.


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Paul Dubé
Ombudsman de l’Ontario



[1] La loi du silence, en ligne.
[2] « L’isolement : pas un problème isolé » en ligne.
[3] Les oubliés de la surveillance, en ligne.
[4] La loi du silence, recommandations 26 à 37, en ligne.
[5] Ce lien s'ouvre dans un nouvel ongletFrancis c. Ontario, 2020 ONSC 1644, paragraphe 269, en ligne, décision confirmée Ce lien s'ouvre dans un nouvel ongleten appel : 2021 ONCA 197, en ligne.
[6] Ibid.